LA RÉPÉTITION

Habillée de silence, aucune fenêtre ouverte,
La ville n’ose à peine provoquer son pavé.  
Dans la rue silencieuse, cette personne alerte
Frappe discrètement au portail délavé.  

Elle tient à pleins bras, un précieux violoncelle.
En voici trois joyeux qui viennent en riant
Puis un autre à vélo, son étui sous l’aisselle
Encore et puis encor les voici fourmillant…

Sous le théâtre, ils vont former tout un orchestre.  
C’est le constant travail au succès essentiel,
Pour le couronnement de toute année terrestre.
Dans la douceur du soir, se posent : matériel,  

Et décor sur la scène, enfin eux dans la fosse
Pour la répétition, c’est la dernière nuit
Avec ce chef-là, pas une note fausse !
Mais c’est avec bonheur qu’ils iront à minuit,

Jouant tout d’un seul trait, la dernière opérette,
Les chanteurs sont en voix, tous les décors fin prêts.  
En se quittant au jour, contents de la répète,  
Ils seront beaux demain, vêtus de leurs apprêts.

Habillée de silence, aucune fenêtre ouverte,
La ville n’ose à peine provoquer ses pavés,  
Le théâtre endormi, sur la place déserte,  
Bombe le torse en vain, ses piliers entravés

Par de vastes panneaux, annonçant le spectacle,  
Affiches flambantes du programme à venir.  
Les marches de granit ne feront pas obstacle
À la foule joyeuse qu’on devra maintenir.  

Juste le temps qu’il faut, pour laisser les placeuses
De conduire l’autre et l’un, aux fauteuils de velours,  
Brouhahas, va-et-vient, de personnes tousseuses
Qui peu à peu se taisent… Le silence est bien lourd.  

De la fosse soudain, on entend la musique,
C’est enfin l’orchestre qui lance ses accords
Hommes en jaquette, puis leurs porte-musique
On entend les violons, de brefs éclats de cors,

La baguette levée, le chef en redingote
Le brigadier alors, a frappé les trois chocs.  
C’est l’ouverture au trot d’une vie parigote,
C’est la joie annoncée des opéras loufocs.

une saga bien enlevée écrite avec brio j'ai vécu la scène comme si j'y étais
amitiés
raymonde

Merci Raymonde, souvenir d'enfance quand j'accompagnais ma mère aux répétitions du Théâtre de Rennes. Il y aurait quelques corrections à apporter au texte écrit dans la foulée du souvenir que j'ai voulu partager !